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Fait marquant | Micro-nanoélectronique

Une nouvelle clef en fer pour la supraconductivité à haute température


​Des chercheurs de l'Irig réalisent des études de diffusion des neutrons sur le pnicture de fer-nickel-arsenic, un matériau supraconducteur à des températures moins basses que celles classiquement rencontrées. Ils sont parvenus à sonder ce composé à l’échelle atomique et leurs résultats pourraient favoriser la proposition d'un mécanisme commun à tous les matériaux supraconducteurs.

Publié le 11 mai 2022
Dans un supraconducteur classique, comme dans certains métaux, le courant circule sans résistance à très basse température (< 20 K) grâce aux électrons qui forment des paires (dites paire de Cooper). Hélas, les conditions compliquées et donc coûteuses pour maintenir de telles températures extrêmes constituent un frein pour exploiter les avantages de la supraconductivité dans la vie courante. Dans les années 1990, de nouveaux matériaux supra-conducteurs à plus haute température (jusque 135 K) ont été découverts. Dans ces composés, on suppose que les paires de Cooper sont formées grâce au magnétisme. Cependant le mécanisme exact n'est pas encore compris. Dernièrement, les composés à base de fer-nickel-arsenic, supraconducteurs vers 50 K, ont entrouvert des perspectives pour la compréhension de ce mécanisme. Cependant, les études fondamentales sur ces matériaux sont compliquées car peu de sondes peuvent voir les électrons porteurs de courant interagir avec les moments magnétiques des atomes.

C’est dans ce contexte que des chercheurs de l’Irig [collaboration] réalisent des expériences sur le pnicture de fer-nickel-arsenic afin d’étudier la dynamique des spins des électrons responsables de l’effet de supraconductivité. Ils ont ainsi sélectionné le CaK(Fe1-xNix)4As4, un nouveau matériau composé d’une couche d'arséniure de fer-nickel qui sépare alternativement une couche de calcium et une couche de potassium. La structure de ce composé est particulièrement intéressante car les atomes de fer forment des motifs carrés, avec les moments magnétiques des atomes de fer qui pointent vers leurs centres (Figure). Cet arrangement des moments magnétiques du fer joue un rôle essentiel dans l’effet supraconducteur.
Grâce au flux de neutrons générés par le Très Grand Instrument de l’Institut Laue Langevin, à Grenoble, et aux instruments que l’Irig exploite dans cet environnement, ces chercheurs sont parvenus à sonder le composé à l’échelle atomique. Ils ont ainsi pu mettre en évidence l’origine du couplage des spins des électrons avec les moments magnétiques des atomes de fer : le couplage provoque une agitation des spins qui se mettent en paire pour former l'état supraconducteur et qui s’orientent préférentiellement selon une direction perpendiculaire aux couches de fer-nickel-arsenic.

Ces expériences nouvelles confirment les théories pour interpréter le phénomène de supraconductivité : lorsque le matériau se refroidit jusqu’à la température critique (pour laquelle le matériau devient supraconducteur), les agitations des spins incitent les électrons itinérants à s'apparier ce qui favorise l’établissement de la supraconductivité. Ces résultats permettraient de proposer un mécanisme commun à tous les matériaux supraconducteurs.


Schéma du composé fer-nickel-arsenic.
Le réseau carré des atomes de fer (boules bleues) et leurs moments magnétiques (flèches rouges) forme des couches horizontales. Perpendiculairement, les agitations des spins des électrons (e-) accentuent leur formation par paires pour favoriser l’état supraconducteur à plus haute température.
Crédit : Huiqian Luo team/Institute of Physics, Chinese Academy of Sciences.
Pnicture : composé chimique formé avec un élément de la famille des pnictogènes, c’est-à-dire les atomes de la quinzième colonne du tableau de Mendeleïev (azote N, phosphore P, arsenic As, antimoine Sb, bismuth Bi).
Moment magnétique, spin : degré interne de liberté des électrons et des atomes qui est à l’origine du magnétisme notamment. On les visualise par des flèches.

Collaboration : Académie chinoise des sciences, Laboratoire Léon Brillouin. 

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