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Fait marquant | phytoremédiation

Le yin-yang de l’uranium dans la plante Arabidopsis thaliana


​Lorsqu'ils font pousser un mutant d'Arabidopsis affecté dans l'absorption du fer dans des conditions de culture variées, des chercheurs de notre institut montrent que, suivant les niveaux d’absorption du fer et du phosphate, l’uranium peut être, soit délétère, soit bénéfique. Comment expliquent-ils ce paradoxe ?

Publié le 24 novembre 2017

L'uranium est naturellement présent dans l’environnement. Il peut être redistribué par les activités minières, militaires et agricoles. Ce radionucléide, chimiotoxique pour tous les organismes vivants, peut s’accumuler localement à des concentrations qui présentent des risques potentiels pour les agrosystèmes et la santé humaine. En effet, même s’il n'est pas essentiel pour les plantes, l’uranium est absorbé à partir du sol, incorporé dans la biomasse et entre ainsi dans la chaîne alimentaire. La compréhension des mécanismes physiologiques, biochimiques et moléculaires qui contrôlent la réponse et l’adaptation des plantes à un stress induit par l’uranium est un prérequis à la sélection d’espèces adaptées à la phytoremédiation et à l’amélioration de la sécurité des aliments.

Des chercheurs de notre institut ont analysé les effets de l’uranium sur un mutant d’Arabidopsis thaliana (mutant irt1) qui est affecté dans l’absorption du fer, élément essentiel dont l’homéostasie est fortement impactée par l’uranium. Le transport de fer à haute affinité par la protéine IRT1 ne correspond pas à une voie majeure d’absorption de l’uranium chez Arabidopsis puisque le mutant irt1 (chez lequel la protéine IRT1 est inactive) accumule autant de radionucléide dans ses racines et ses feuilles qu’une plante sauvage. Toutefois, l’analyse de la réponse du mutant irt1 à un stress uranium révèle plusieurs niveaux d’interférence entre le radionucléide, le fer et le phosphate. Ainsi, quand la disponibilité en phosphate dans le milieu est suffisante, le mutant irt1 présente les caractéristiques d’une déficience en fer dans les chloroplastes. Alors qu’un reverdissement est observé dans le cas de la plante sauvage, ces symptômes (chlorose, inhibition de la photosynthèse) sont abolis par l’uranium dans le cas de irt1. Cet effet bénéfique inattendu de l’uranium serait dû à une compétition entre le radionucléide et le fer pour une complexation avec le phosphate. Dans les racines et les feuilles, l’uranium serait capable de déplacer le fer inactif des complexes fer-phosphate pour libérer du fer actif pour les processus de biogenèse et pour le métabolisme. Lorsque le phosphate est en quantité limitante dans le milieu, la biodisponibilité de l’uranium est accrue et le radionucléide est absorbé plus efficacement par la plante. Les effets toxiques de l’uranium sont alors clairement visibles dans la plante sauvage et le mutant irt1 (arrêt de croissance). Les analyses montrent qu’un des mécanismes clé de la toxicité de l’uranium est lié à une interférence avec l’homéostasie du phosphate et plus particulièrement à l’induction d’une carence en composés phosphorylés.
Ce travail souligne que l’homéostasie du fer et du phosphate sont intimement liées, et que toute perturbation affectant un des deux éléments a des répercussions sur de nombreux processus cellulaires. Il suggère que l’uranium pourrait détourner les machineries d’import, de translocation, de complexation et de séquestration du fer.


Effets yin-yang de l’uranium sur la physiologie de la plante Arabidopsis thaliana sauvage (WT) et du mutant irt1.
Après 4 à 5 semaines de culture hydroponique dans des conditions standards, les plantes WT et irt1 d’Arabidopsis sont traitées avec du nitrate d’uranyle, en présence de fortes concentrations en phosphate (HP) ou de faibles concentrations en phosphate (LP).
Observations après une exposition de 21 jours en présence de 50 µM de nitrate d’uranyle.

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